Retour sur un millésime 2019 sous contrainte, mais prometteur.

Retour sur un millésime 2019 sous contrainte, mais prometteur.

Des conditions climatiques contrastées durant la phase de repos végétatif

C’est du côté de l’automne 2018 que nous revenons pour démarrer ce bilan du millésime 2019. Il fut marqué par des cumuls de précipitations excédentaires en octobre (fortement) et en novembre (dans une moindre mesure) sur l’Hérault, particulièrement dans l’Ouest du département. La recharge des réserves hydriques s’est également opérée en Vallée du Rhône à cette période.

Se succédèrent ensuite de décembre 2018 jusqu’au débourrement quatre mois peu pluvieux à très secs. Coté températures, elles sont froides en janvier mais la douceur est de retour en février et se poursuit en mars.

Un début de cycle précoce suivi de conditions climatiques défavorables au développement végétatif et à la floraison

Conséquence d’un cumul de température favorable en février et mars, le débourrement est précoce. Il est atteint en 2019 avec 8 à 10 jours d’avance sur carignan par rapport à 2018 (année normale). Les pluies d’avril accompagnent correctement le démarrage de végétation. Mais les températures fraiches qui suivent en avril et surtout en mai freinent le développement végétatif. L’activité microbienne des sols est limitée par ces températures inférieures aux normales : l’azote, le phosphore et le fer sont ainsi moins disponibles pour la vigne. On observe d’importants jaunissements et une forte hétérogénéité des stades phénologiques qui continuent d’avancer malgré le quasi arrêt de la pousse.

Ces conditions climatiques fraiches sont également peu favorables au bon déroulement de la floraison : les carences azotées de début de cycle favorisent la coulure. De même que la forte reprise de croissance des végétations qui arrive dès que l’on retrouve des températures de saison. Le coulure touche principalement les secteurs précoces.

À noter également ce printemps, deux épisodes de gel qui touchent les départements de l’Hérault et du Gard les 4 et 5 avril (secteurs précoces, hauts coteaux) et 6 mai (bords de rivières, bas-fonds). À cela s’ajoutent un orage de grêle le 6 avril entre Combaillaux, Saint-Mathieu-de-Tréviers et Assas et le 16 juin dans le secteur de Crozes-Hermitage. Les dégâts relatifs à ces épisodes sont hétérogènes avec quelques cas de parcelles voire de domaines fortement impactés.

Un été de contrastes

Coté ressource en eau, la contrainte hydrique est modérée à la mi-mai. Du point de vue sanitaire, la pression mildiou est restée faible du fait de la météo (faible pluviométrie et températures) et début de protection très précoce en raison de l’inoculum 2018. En revanche la pression oïdium s’est montrée forte toute la saison.

Dans la lignée de ce printemps, le mois de juin est resté frais dans sa première moitié puis les températures sont montées après le 20 au niveau estival. Le pic de chaleur exceptionnel enregistré le 28 juin restera dans les mémoires. Il occasionne des dégâts d’échaudage parfois très violents avec perte quasi-totale de récolte. L’effet du soufre vapeur accentue ces phénomènes de brulures sur feuilles et sur grains dans les vignobles bio. Les secteurs les plus touchés sont les Terrasses du Larzac, la moyenne vallée de l’Hérault, le Montpelliérais et les Costières-de-Nîmes. Le Bitterrois et la Vallée du Rhône ont été moins impactés. Cette journée du 28 juin marque également le début d’un série d’incendies particulièrement ravageurs cette année. Elle concerne les Costières-de-Nîmes (le 28 juin et le 02 août), Saint-Christol (15 juillet) et Saint-Jean-de-la-Blaquière (06 septembre). Les conséquences ont été, dans certains cas, œnologiques avec apparition de notes brulées dans les vins.

En juillet la chaleur reste très marquée en particulier dans le Gard et le Vaucluse. L’état de sécheresse des sols en est renforcé. La contrainte hydrique augmente malgré les quelques pluies rencontrées.

La véraison est tardive et étalée : on compte 8 jours de retard sur grenache en Vallée du Rhône et 8 à 10 jours sur carignan en Languedoc. Le mois d’août reste chaud et sec. On note quelques orages localisés en fin de mois (Berlou, Saint-Chinian).

Des rendements très variables d’un secteur à un autre …

Les sorties en début de saison étaient belles globalement sur tous les cépages. Mais les aléas climatiques (gel, grêle, échaudage, sécheresse) et la coulure ont pu impacter, très fortement, le rendement de façon très localisée d’une vigne à l’autre, et d’un domaine à l’autre. La baisse de production concerne davantage les secteurs littoraux (Grès de Montpellier, Costières de Nîmes) et le Montpelliérais que l’ouest du Languedoc et la Vallée du Rhône. Cette année le vignoble bio, hors dégâts d’échaudage, a maintenu des rendements satisfaisants avec un effet d’alternance sur les vignes très touchées par le mildiou en 2018.

Les derniers chiffres de début Octobre font ainsi état d’une récolte « moyenne » de 11,5 MhL (source Agreste) dans le Languedoc-Roussillon. Elle est en deçà de la récolte 2018 (12,6 MhL) et de la moyenne des cinq derniers millésimes (12,3 MhL). Sur la région sud-est, la récolte est légèrement en hausse par rapport à 2018 (+ 1 % avec 5,11 MhL), mais en deçà de 5 % par rapport à une récolte moyenne.

Un début de vendange accéléré par la chaleur

On retrouve, à l’approche des vendanges, le retard observé à véraison. Mais les chaleurs de la fin du mois d’août et de début septembre, associées au retour du vent du nord ont accéléré le déclenchement des vendanges. C’est particulièrement le cas dans les secteurs précoces : littoral, Montpelliérais, Piscenois, Costières-de-Nîmes, rive droite du Rhône et secteurs précoce du Vaucluse. Des phénomènes de concentration s’observent sur les parcelles en situation de stress hydrique : particulièrement marqués sur les jeunes vignes, les parcelles échaudées en juin, certains cépages en secteur non irrigué (syrah et merlot notamment).

Les blancs et rosés rentrés à cette période sont, malgré la chaleur, aromatiques et portés par de belles acidités. C’est particulièrement le cas des cépages Muscat, Chardonnay, Sauvignon, Vermentino, Cinsault, Grenache. Associés à des teneurs basses en potassium, les acidités élevées seront conservées.

Retenons que les équilibres sucres/acidités et les rendements en jus restent hétérogènes et dépendants des régimes hydriques des parcelles. En rouge, les baies sont petites et présentent de forts potentiels tanniques. Les extractions douces sont privilégiées.

Un millésime en deux temps

Le mois de septembre est ensuite marqué par deux perturbations les 10 et 18 septembre qui restent modérées (pas d’épisode cévenol comme on le craignait). Se distingue Saint-Chinian avec des précipitations plus généreuses (80 mm). Associée aux nuits fraiches, cette eau apporte une respiration et permet aux cépages méridionaux (roussanne, grenache, mourvèdre) de mûrir de façon plus équilibrée en favorisant la maturation phénolique même s’ils conservent le retard de maturation initial. Ainsi, en Vallée du Rhône, le début de vendanges ne sonne qu’à mi-septembre à Chateauneuf-du-Pape, au nord Ventoux, Gigondas, Beaumes de Venise.

Dans cette seconde phase, les rendements en jus sont plus confortables. Les cépages méridionaux se montrent même plus généreux que pour les millésimes précédents dans la Vallée du Rhône.

Au final

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, les maturités ont été difficiles à suivre et le déclenchement des vendanges souvent compliqué à prévoir. La contrainte des sucres élevés a souvent donné le rythme des récoltes même après les pluies. Les extractions ont dû être pilotées avec soin. On peut résumer en quelques grandes lignes dans le tableau ci-dessous les équilibres de quelques cépages emblématiques :

2019, un millésime à suivre…